Patrick Grainville est immortel! C’est le nom que l’on donne à ceux et celles qui sont nommés/es à l’Académie Française. L’Académie Française c’est un lieu où un groupe de personnes savantes (des écrivains par exemple) sont réunis pour réfléchir et proposer des changements ou des inventions de la langue française, ils/elles sont donc très importants/es! Cesont eux/elles qui élaborent le dictionnaire et fixent les usages de la langue française. Par exemple ils vont causer de l’écriture inclusive…est-ce que l’on peut dire « autrice » pour une femme qui écrit ou auteur ou auteure?
Alors lui Patrick Grainville il parle comme ça de son adolescence, de sa vie et de comment les mots lui ont permis de vivre!
« Quand j’étais jeune adolescent j’ai traversé comme beaucoup une crise de manque, de vide, de solitude. Avec la première prise de conscience de l’absurdité de la vie ce sont les mots qui m’ont secouru, fortifié, ouvert des horizons de rêve, de liberté? de rébellion.
La lecture m’a arraché au quotidien morne du lycée, les mots étaient nourriciers je les apprenais avec avidité, gourmandise, j’adorais le vocabulaire que je considérais comme une tribu vivante, incarnée, qui peuplait mon imagination… je n’étais plus seul!
J’avais un vaste pays luxuriant de mots, je lisais énormément, j’entrais dans des paysages nouveaux, des histoires qui n’étaient pas la mienne, j’aimais les récits de voyage, d’aventure d’exploration, les animaux sauvages, les grands arbres, les royaumes inconnus, les villes délirantes, j’adorais l’Afrique , l’Asie, l’Amazonie les noms exotiques merveilleux. Et quand, plus tard, j’entre dans la vie, quand je suis nommé professeur, le vieux sentiment de vide, de solitude, d’absurdité me reprend.
Alors j’écris Les flamboyants qui m’ont valu le prix Goncourt , je raconte une aventure africaine dans un royaume imaginaire et un paysage extraordinaire d’arbres, de fleuves, de corps, je prends plaisir à tracer des plans de ce royaume j’adore inventer les noms, des lieux autour du roi « Tokor Yali Yulmata »…
C’est une grande défonce de sonorités qui m’enchante, c’est le même désir de pays de corps différents de paysages qui me porte quand j’écris Le baiser de la pieuvre qui se passe au Japon où Bison qui se déroule dans la grande plaine américaine
Écrire m’a permis d’habiter un monde qui m’apparaissait étranger, inhabitable.
Dans mon dernier roman Falaise des fous Etretat est un royaume plein de souffle, de vent, de mers, de murailles blanches trouées d’arches, un lieu où je rencontre Monet et Courbet qui eux aussi ont peint le monde avec leur vison singulière, leur couleurs, leurs modelés, leurs signatures.
C’est pour moi l’enchantement quand un créateur corrige le monde, le métamorphose dans son art et le rend plus envoutant j’aime les créteurs qui nous libèrent de la création de Dieu, qui nous révèlent notre liberté d’inventer un autre réel.
Vive Prométhée le voleur de feu,
Voler le feu voilà la Vie! »

Pour une écoute de ce texte et plus largement pour connaître un peu mieux ce personnage:
https://www.franceinter.fr/emissions/boomerang/boomerang-13-mars-2018